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Médecins du Monde s’oppose au brevet sur le sofosbuvir

Hépatite C : fléau, remède et scandale

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L’opposition au brevet

Une opposition au brevet est un recours par lequel toute personne intéressée peut contester la validité d’un brevet devant l’office qui l’a délivré. Il a déjà été utilisé par la société civile dans d’autres pays (Inde, Brésil, États-Unis) pour faire annuler des brevets abusifs et autoriser la production de versions génériques plus abordables.
c’est la première fois en europe qu’une ONG médicale utilise ce recours pour améliorer l’accès des patients aux médicaments. La politique de rationnement mise en œuvre en France et en Europe a poussé Médecins du Monde à étudier les caractéristiques du brevet sur le sofosbuvir. Or, si l’utilisation du sofosbuvir pour traiter l’hépatite C est une avancée thérapeutique majeure, nous considérons que la molécule en elle-même, fruit de travaux de nombreux chercheurs publics et privés, a été abusivement brevetée.
l’office indien de propriété intellectuelle a récemment rejeté une demande de brevet de Gilead sur un dérivé du sofosbuvir. L’Egypte, elle-aussi, se prépare à rejeter ce brevet.

Si Médecins du Monde gagne cette opposition, des génériques seront-ils disponibles en Europe ?

Même si cette bataille juridique était gagnée, il n’est pas certain que des versions génériques du sofosbuvir pourront être produites en Europe. En effet, Gilead revendique de multiples brevets sur le sofosbuvir et ses dérivés. Seul le brevet sur le sofosbuvir a pour l’instant été accordé par l’Office européen des brevets, les autres sont toujours en cours d’examen. Même si, suite à l’action de Médecins du Monde, le brevet sur le sofosbuvir est révoqué – et ce dans toute l’Europe – l’existence d’autres brevets peut bloquer la production de génériques.
Cette action est néanmoins l’occasion pour Médecins du Monde d’alerter l’opinion publique sur le fait que les pays européens n’ont plus les ressources nécessaires pour garantir, à ce prix, l’accès au sofosbuvir pour tous les patients qui en ont besoin.
Médecins du Monde profite également de cette occasion pour relancer le débat public ouvert avec d’autres associations françaises en 2014 sur le mode de fixation du prix des médicaments en France et son impact sur le système de santé. C’est l’un des nombreux enjeux du projet de loi santé qui sera discuté au Parlement ce printemps.

Médecins du Monde est-il opposé à l’innovation médicale ?

Non. Médecins du Monde est un acteur humanitaire de santé soucieux de l’innovation médicale et reconnait l’avancée thérapeutique majeure que représente l’utilisation du sofosbuvir pour le traitement de l’hépatite C. Médecins du Monde ne combat pas l’industrie pharmaceutique mais ses abus. En analysant la manière dont a été développé et commercialisé le sofosbuvir, nous constatons que Pharmasset et Gilead ont dévoyé le système du brevet : des milliers de molécules pour lesquelles il existait une potentialité d’efficacité thérapeutique ont été brevetées – alors que le brevet est conçu pour récompenser, avant tout, une invention qui implique une activité innovante, et non pas une intuition. Cela prive également les autres chercheurs de développer, à partir des molécules brevetées a priori, d’autres médicaments potentiellement encore plus innovants.
Utilisé abusivement, le brevet ne joue plus son rôle d’incitation à l’innovation mais, au contraire, la stérilise.

Recommandations

Médecins du Monde demande :

  • La diminution drastique du prix du sofosbuvir pour qu’il puisse être prescrit à toutes les personnes atteintes d’une hépatite C chronique.
  • L’ouverture d’un débat public sur les modes de fixation des prix des médicaments et sur les modèles alternatifs aux brevets pour financer la recherche et le développement de nouveaux médicaments.
  • La représentation des associations de patients et de lutte contre les inégalités de santé au sein du CEPS et de la Commission de transparence de la Haute Autorité de Santé (HAS).
  • La transparence sur les coûts de recherche et développement des laboratoires et la traçabilité des financements publics de la recherche.